Le lagon de Mayotte abrite un mammifère marin rare et mystérieux, le dugong. Si la population de dugongs y était autrefois abondante, seul un nombre très limité d’individus subsiste encore aujourd’hui dans les eaux mahoraises. Pouvoir en observer est devenu une chance inouïe
Le dugong et ses apparences
Le dugong est un gros animal pesant 500 kg en moyenne et qui mesure 4m de long. À première vue, son apparence se rapproche de celle d’une baleine grise. Toutefois, le dugong est beaucoup plus placide que cette dernière et ne dispose pas d’évent. À la place, il a deux énormes narines. Dépourvu de nageoire dorsale, le dugong dispose d’un dos arrondi et lisse. Il possède un corps allongé, avec une tête et sans cou, des yeux minuscules, un gros ventre et de petites nageoires arrondies. Ce jeune mammifère possède une apparence un peu similaire à celle d’un être humain.
À l’instar des cétacés (baleines et dauphins) et des pinnipèdes (otaries, phoques et morses), les siréniens sont des mammifères retournés au monde aquatique. On peut distinguer les dugongs des pinnipèdes sous bien des aspects. Les dugongs :
- sont plus lents
- sont dépourvus de poils (seulement de petites moustaches sur le museau)
- sont inaptes à sortir de l’eau (l’accouchement se passe dans le lagon)
- sont de plus grandes taille
- ont une queue aplatie, séparée en deux (comme celle des dauphins)
Une vache marine
Le dugong fréquente majoritairement les zones côtières de petite profondeur même s’il arrive qu’il aille en eau plus profonde lorsque les circonstances l’éxigent. Le dugong s’alimente d’herbes à fleurs dans les prairies sous-marines constituées algues. Il peut consommer jusqu’à 40 kg d’herbe fraîche par jour. Ils se trouvent souvent dans les baies ainsi que dans les vastes chenaux de mangroves. Ayant un mode de vie plutôt sédentaire, le dugong limite ses déplacements uniquement entre les aires de repos et d’alimentation. Néanmoins, des déplacements saisonniers (de quelques dizaines de kilomètres) pour regagner l’eau chaude ont été observés. Aussi, les dugongs peuvent parcourir des milliers de kilomètres dans l’océan.
Les dugongs dans le monde
Les dugongs vivent généralement dans les eaux salées. Toutefois, ils peuvent se retrouver dans les endroits où il y a de l’eau saumâtre (zone de transition entre l’eau salée de la mer et l’eau douce). Les dugongs habitent dans les zones côtières tropicales et subtropicales de l’Indo-Pacifique. La majorité de la population des dugongs (plus de 70 000) se trouve en Australie, environ 6000 dans le Golfe Persique, environ 2000 en Mer Rouge et environ 700 en Nouvelle-Calédonie.
Le WWF (World Wildlife Fund) a estimé l’ensemble de la population des dugongs à environ 85 000 animaux. Avec des effectifs en baisse, l’espèce est aujourd’hui classée Vulnérable (VU) sur la liste rouge de l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature).
Les dugongs femelles
Les dugongs sont des mammifères allaitants. En période d’allaitement, on peut observer les grandes mamelles de la femelle dugong depuis la surface. C’est d’ailleurs pour cela qu’on les compare à des sirènes. Parfois, elles communiquent en chantant avec une voix aiguë. En malais, dugong signifie « dame de la mer » et dans la classification des biologistes, ils sont appelés les « siréniens ».
Comme les tortues, les dugongs sont des animaux vivants au ralenti. Les femelles atteignent leur maturité à l’âge de 10 à 17 ans et donnent naissance à un petit tous les sept ans. Les dugongs adultes peuvent vivre jusqu’à 70 ans. Par conséquent, le renouvellement de ces espèces s’avère être très faible. De plus, ils sont en voie de disparition à cause de la pêche. Ce fut d’ailleurs le cas pour les Maldives, l’île Maurice et plusieurs autres endroits.
De rarissimes sirènes mahoraises
Il fut un temps où l’espèce était nombreuse à Mayotte avant que la surpêche l’extermine. Selon le Parc Naturel Marin, on compte actuellement moins d’une dizaine d’individus, dont la majorité sont des mâles. Les dugongs sont strictement protégés depuis 1995. En 2015, un pêcheur a tué l’une des dernières femelles. Ce dernier a passé 3 mois de prison ferme avec une amende conséquente pour extermination volontaire d’espèce en voie de disparition.
Croiser des dugongs à Mayotte : une expérience touristique unique
Les générations futures n’auront sans doute plus la chance de croiser de dugong mahorais. Les derniers individus habitent les herbiers extérieurs de l’est de Mayotte. Le parc Marin et quelques réseaux, dont TsiÔno, procèdent à un suivi de la population subsistante.
Les dugongs sont plus faciles à observer que les baleines. De ce fait, ils offrent tant aux Mahorais qu’aux touristes, une expérience exceptionnelle. Se retrouver face à ces sirènes géantes parfaitement pacifiques, au chant envoûtant n’arrive qu’aux plus chanceux.
Une espèce menacée au bord de la disparition
Depuis 1997, l’utilisation de filet dans le lagon mahorais a été réglementée. Malgré cela, on a recensé quelques captures accidentelles sur la dernière décennie.
Outre la pêche, d’autres risques menacent également la population des dugongs :
- le risque de collision
- le trafic maritime
- la détérioration de son milieu de vie
- la pollution acoustique
Comme celle des baleines, l’observation des dugongs se fait de manière réglementée. L’approche à moins de 100m est interdite, le nombre maximum de navires autorisés dans la zone des 300m se limite à 2, la vitesse est réduite à 5 nœuds et l’approche par l’avant et l’arrière des mammifères est interdite.